Lettre ouverte du Grand Rabbin Gutman aux responsables du culte musulman

23 août 2016 2 Par Eli

Grand rabbin René Gutman.

Dieu n’est pas grand, lettre ouverte aux responsables du culte musulman.

Il n’est pas anodin que la première victime de l’Histoire sainte se soit appelée Abel, car Abel, en hébreu, signifie aussi le fait de souffler, de respirer. Mais c’est un souffle court, éphémère. Et c’est ce mot (« hévèl ») que le livre de l’Ecclésiaste a choisi pour évoquer la fragilité et la vulnérabilité d e la vie. Je cite cet exemple au moment où la frontière entre la vie et la mort se révèle, au fil de l’actualité, si criante et si déconcertante à la fois.

Abel symbolise en effet la fragilité de la vie, puisqu’en fin d e compte, tout ce qui nous sépare de la tombe est le souffle que Dieu a insufflé en nous comme il est dit dans la Genèse « alors Dieu forma l’homme de la poussière de la terre et insuffla en ses narines un souffle d e vie ».

Voilà donc en vérité tout ce que nous sommes, un souffle, mais c’est un souffle divin. Comment donc ce Dieu vers lequel nous nous tournons, au moment où l’on agresse, en son nom, un être humain, ne ressentirait-il pas une douleur infinie devant le spectacle de cette violence telle que celle qui a motivé l’agression, d’un juif parce que juif, en le poignardant par derrière et en criant « Dieu est grand! »

Comment ce Dieu, qui est le Dieu de tous les croyants, le Dieu d’Abraham, ne pâlirait-il pas de honte en entendant crier « qu’il est grand » en même temps que l’agresseur plante son couteau dans la chair de sa victime, créée ; comme lui, « à l’image de Dieu ? »

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Si la Bible nous rappelle que Dieu a refusé le sacrifice de Caïn, c’est bien par ce que sa religion était déjà une religion d e la mort, car le sacrifice que Dieu a accepté, celui de Abel, est celui du vrai repentir, celui du vrai cheminement spirituel, c’est-à-dire celui qui vient de l’humilité, de la moralité, et qui est inspiré par la conscience de sa mortalité. C’est celui du fidèle qui s’adressant à Dieu lui dit: » je ne suis que « Abel », je ne suis qu’un simple souffle, mais c’est ton souffle que je respire, pas le mien!

Or lorsqu’une religion, ou ce qu’on en fait, devient une religion de la Mort, lorsque ceux qui y adhèrent ont choisi la mort, toute effusion de sang, toute agression, tout attentat font dire à Dieu ce qu’il déclara à Caïn:  » le sang de ton frère crie vers moi ». Une telle idéologie symbolise ici un mode de civilisation, si tant est qu’on peut la qualifier ainsi, qui conduira Dieu à dire, devant la violence généralisée de la génération du Déluge, ( Genèse, 6,6):  » qu’il regrettait- d’avoir crée l’homme! Et à Noé de se résigner devant Dieu en disant ( Sourate 71)  » j’ai appelé mon peuple vers toi nuit et jour mais mon appel n’a fait qu’augmenter leur éloignement. »

De vous, chers Amis, nous attendons ce même cri que Dieu proféra lui-même, cette même protestation publique, lorsque l’on agresse, blesse ou tue un être humain en son nom : »Qu’as tu fais de ton frère? »

Partout où une telle violence nourrie de l’Islam radical vient à sévir, de vous chers Amis, nous attendons que vous n’ayez de cesse de condamner celui qui l’a commise, qu’il soit idéologiquement radicalisé ou psychiquement fragile, par ce que ce Dieu qu’il a invoqué, n’est pas grand, par ce que ce Dieu n’est jamais grand, mais qu’au contraire, il est infiniment petit et comme écrasé par l’offense qui lui a été faite.

Qui d’autres que vous pourraient le témoigner à vos propres fidèles, vous qui êtes avec nous les enfants d’Abraham, dont le Dieu est le Dieu de la vie, celui que l’on adore seulement en consacrant la vie et en la chérissant, comme tous ceux qui ont été tués ou blessés jusqu’à ce jour par des gens qui, eux, ne croient qu’en la mort, et qui nous refusent le droit élémentaire que tout individu à sur terre, de vivre , et de vivre sa foi ou sa culture sans crainte qu’on l’assassine, ou qu’on le poignarde au détour d’une rue, comme ce fut le cas vendredi dernier à Strasbourg.

Oui, chacun d’entre nous n’est qu’un souffle, même si « Dieu nous a crées sous des formes différentes », dit la même Sourate, et c’est le souffle de Dieu. Mais ce n’est qu’en le clamant avec force, que nous serons les enfants d’un monde et d’une humanité en paix, notre avenir et celui de nos enfants, un avenir d’espérance , et que Dieu sera enfin grand.

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